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15 avril 2010

LA CIRCONCISION DIOLA : UNE DIMENSION DE L’INITIATION

LA CIRCONCISION : UNE DIMENSION DE L’INITIATION TRADITIONNELLE DIOLA

bukut

Je salue ici la démarche intellectuelle entreprise par l’abbé Jules Pascale Coly par rapport à une problématique complexe : l’initiation Diola. Dans son article, il a posé le problème de manière à éclairer les fidèles chrétiens originaires des villages concernés. Il ne s’agit pas de diaboliser à la manière des premières missionnaires une tradition multiséculaire. La circoncision est une étape charnière de l’initiation diola ne peut être comprise que dans son contexte. La critique à faire à nos pratiques ancestrales devrait s’opérer de l’intérieur dans une logique interne pour éviter toute subjectivité ou jugement de valeurs. Je regrette l’amalgame qui subsiste parfois dans l’usage des termes tels que tradition, culture et religion. Cependant, je reconnais qu’il est difficile de distinguer tradition, culture et religion dans les pratiques ancestrales courantes. De la même manière qu’il était tout autant difficile de séparer évangélisation et colonisation. Notre peuple a une histoire, une culture et une tradition riches. Certes, tout n’est pas bon et tout n’est pas mauvais non plus. C’est dans l’évolution du temps que ses éléments s’épurent et s’adapte au contact des autres cultures. Accueilli par la force et la souffrance, l’évangile n’a pas été partout « Bonne Nouvelle ». A la place du Christ, c’est le message de la colonisation qui a été annoncé au peuple diola en faisant table rase de l’existant.  Les juifs et les gentils qui se sont convertis à la nouvelle religion l’ont fait sur la base de leur propre culture avec des incompatibilités qui ont fait l’objet d’un concile à Jérusalem en l’an 50 (Ac. 15,1-35). Des judéo-chrétiens d’obédience pharisienne, réclamant que soit imposé aux convertis d’origine païenne l’ensemble des observations mosaïques, à commencer par la circoncision. Les arbitres sont désignés (v. 6), en la personne des apôtres et anciens, réunis pour l’occasion en un conseil commun. Le discours de Pierre (v. 6-11) constitue le morceau de choix de cette joute oratoire : le premier des Douze s’y réfère à sa propre pratique missionnaire, exercée à Jérusalem dès le début de la vie ecclésiale ; il la justifie au nom du choix de Dieu, manifesté à travers le don de l’Esprit ; il affirme l’impertinence de toute distinction ethnique, au regard de la foi commune à tous ; il dénonce le légalisme juif, insupportable même à ceux qui s’en font les propagandistes ; enfin, il rappelle le primat de la grâce, dans une économie de salut fondée sur la foi… On ne peut rêver plus paulinien que le Pierre du livre des Actes… Si l’on croit Paul lui-même (épître aux Galates), les choses ne furent pas aussi simples… En tout cas, une telle éloquence saisit l’auditoire et reçoit la confirmation de faits concrets ("signes et prodiges") alors rapportés par les deux acteurs de terrain que sont Paul et Barnabé. Et pourtant, leur devenir chrétien et leur foi ont traversé des siècles jusqu’à nous. En faisant étude comparative des deux faits, on remarque des constances. D’une part, on partage la même foi pas la même culture. Et d’autre part, chez les diola, on appartient à la même culture et même ethnie, mais ne confessons pas la même foi. Donc si nous convenons que l’initiation traditionnelle diola relève de l’acte culturel et social, elle ne peut être opposée à la foi chrétienne. Faut-il évangéliser cet acte ? Pourquoi ? Comment ?

La circoncision est une pratique très ancienne et dont l’origine reste inconnue. La signification varie d’une religion à une autre. Dans l’Ancien Testament, c’est Abraham qui reçu l’ordre de circoncire : « Dieu dit à Abraham: Toi, tu garderas mon alliance, toi et tes descendants après toi, selon leurs générations.

C’est ici mon alliance, que vous garderez entre moi et vous, et ta postérité après toi: tout mâle parmi vous sera circoncis.

Vous vous circoncirez; et ce sera un signe d’alliance entre moi et vous » (Gn 17, 9-11)

La circoncision est ici un acte posé à la demande de Dieu par Abraham pour signifier son Alliance avec sa descendance. L’Alliance peut-elle être réduite à cet acte ? Elle va au-delà de l’acte.

La circoncision chez les chrétiens ne se posait pas au départ parce que les premiers chrétiens étaient juifs et donc circoncis. Ainsi, ils continuèrent à pratiquer la circoncision chez leurs descendants et trouvaient qu’il était normal que tout nouveau converti au christianisme doive se faire circoncire. Cette pratique appartenait dans ce cas de figure à la tradition juive. Ce que nous pouvons appeler tradition chrétienne ne s’est construite qu’avec l’apport culturel des uns et des autres au filtre du Kérygme (Le kérygme est la proclamation de la vérité concernant “l'œuvre de Christ”. ... à Dieu de sauver les croyants par la folie de la prédication). Or les chrétiens qu’on veuille interdire d’aller à la circoncision sont peut-être déjà circoncis. Ceux qui vont au bois sacré, ils se font circoncire à l’hôpital avant l’échéance. Donc, ils ont ou vont poser cet acte taxé de démoniaque. Quel est le prêtre qui n’est pas circoncis ? Alors, qu’est-ce qui n’est pas bien : la circoncision ? Le bois sacré où on va couper son bois pour de multiples besoins ? Peut-être l’esprit ? Oui l’esprit ? Mais c’est quoi l’esprit diola ? Est-il incompatible à la foi chrétienne ?

Si l’initiation traditionnelle diola est incompatible à la foi chrétienne, tout l’être diola devrait être incompatible à celle-ci. Car pour parler sa langue maternelle, les parents et la communauté initie l’enfant dès la conception et pendant toute l’enfance et l’adolescence. Je prends l’exemple de la lange parce qu’elle était considérée inapte à véhiculer le précieux message du Christ, la belle liturgie chrétienne. Mais à force de combats et de bon sens, l’église a fini par comprendre que pour mieux évangéliser il faut aller vers les gens en faisant confiance au pouvoir de l’Esprit Saint.  Lorsque Dieu veut agir dans notre vie, il le fait par le Saint-Esprit. Son œuvre principale consiste à transformer les croyants en l'image de Christ. Il convainc également le croyant de péché et de jugement (Jn 16:7-11) ; il enseigne, instruit et conduit dans la vérité (Jn 16:13-15). Il produit le fruit de l'Esprit dans notre vie (Gal. 5:22-23) et il accorde les dons et capacités spirituels pour le service (1 Cor. 12:4, 7,11). C'est par l'œuvre intérieure du Saint-Esprit que le croyant est sauvé et régénéré. Le Saint-Esprit conduit également ce dernier dans sa vie chrétienne, l'équipe pour le ministère et le rend capable d'adorer Dieu d'une manière qui lui est agréable.

Le Saint-Esprit renouvelle l'intelligence du croyant pour qu'il puisse comprendre et reconnaître la vérité et l'autorité des Ecritures. L'Esprit fait de lui une nouvelle créature et lui restaure la communion avec Dieu et avec son prochain.

Il sanctifie le croyant progressivement pour que sa vie devienne de plus en plus un reflet du Seigneur.

Le Saint-Esprit réside en nous et nous devenons son temple. Sa présence se manifeste par le fruit qui peut être résumé essentiellement dans la sagesse et l'amour. Il faut cependant noter que la présence permanente de l'Esprit dans la vie du croyant ne garantit pas une plénitude constante, parce que l'Esprit peut être attristé, d'où le besoin continuel d'être rempli de l'Esprit.

Donc, c’est dans la confiance en l’Esprit que l’exhorte les pasteurs et les fidèles chrétiens diola à faire preuve de discernement dans le processus du devenir chrétien. Ce processus ne doit pas nous extirper des fondamentaux de nos cultures et traditions diola. Car comme le dit Bruno Raya « un peuple sans culture, c’est comme un arbre sans racines ».

Paul Ange DIATTA

Tél. 0033663561049

ange_diatta@msn.com

Réaction de Patrice Diatta


Personnellement j'ai été très étonné des nombreux amalgames notés ça et là.
- D'abord celui qui consiste à confondre la cérémonie d'initiation Joola à un rituel diabolique. C'est exactement la même approche qu'avaient les tout premiers missionnaires occidentaux quand ils ont venus "chasser les ténèbres" en Afrique pour y semer "la civilisation". Aujourd'hui, les chercheurs en sciences sociales et les anthropologues en particulier nous ont aidé à dépasser ces préjugés évolutionnistes sur les religions et/ou les cultures africaines et je m'étonne que Jules Pascal, que je connais, en soit encore là. Je suis sûr que s'il se documentait un petit peu plus - en sortant de la seule théologie (il pourrait lire par exemple les travaux du Père Michel Gerlier sur l'inculturation ou sur la religion manjaku précisément, ou encore ceux du Père Nazaire Diatta, de Louis-Vincent Thomas sur l'initiation Joola, etc - il aurait un avis beaucoup plus nuancé.
- Ensuite celui qui laisse penser le lecteur que les Joola seraient "animistes", "paganistes","idolâtres", ou, tout au plus, "polythéistes" en ce sens qu'ils offriraient des sacrifices à des puissances et non à Dieu. Or il me semble que ce n'est pas le christianisme qui a montré  aux Joola l’existence de "Ata Emit", concept qui ne s'emploie d'ailleurs jamais au pluriel.
- Enfin le dernier amalgame, et non le moins grave, c'est la confusion totale entre religion et culture. Dans le kassa, à Mlomp exactement, le fait d'immoler beaucoup de taureaux et autres animaux au sortir de la grande initiation, n'est pas nécessairement un SACRIFICE RELIGIEUX. Les animaux n'étant pas tués devant un autel, mais dans la nature, c'est donc un acte profane, c'est pour faire la fête. C'est exactement comme quand on immole des animaux pendant les ordinations, les mariages, etc.
Tout ce bavardage pour dire que je ne suis pas convaincu de l'incompatibilité entre foi chrétienne et initiation Joola. Au contraire, il est urgent, me semble-t-il, pour les pasteurs de nos églises d'encourager le dialogue entre le christianisme et la religion négro africaine pour l'unification du fidèle chrétien en terre africaine et pour l'épanouissement des aspects les plus nobles de la foi de nos pères.
Amicalement
Patrice Boc

Je trouve tes interrogations très pertinentes même si elles font sourire un petit peu.
Si l’initiation n’était qu’un mécanisme de transmissions de connaissances (intellectuelles, religieuses et/ou mystiques), elle aurait complètement disparu aujourd’hui. Car, de nos jours, le modèle d’éducation occidental qui s’est érigé en référence universelle en matière de transmission organisée des connaissances, nous conduit à considérer que le savoir est toujours d’ordre intellectuel et que l’enseignant est là pour expliquer des concepts qui pourraient aussi être appris avec des livres ou des vidéos, même lors d’un enseignement en relation avec la spiritualité.
Et pourtant, un peu partout dans le monde, l’évocation du concept d’initiation qui remonte à la nuit des temps et franchi les frontières continue encore de faire sens (cf. Les loges maçonniques en Occident, certains arts martiaux en Asie, etc.).
Pour ce qui est de l’initiation en Afrique Noire, ou en pays Joola précisément, elle est toujours destinée à réaliser psychologiquement le passage d’un état, réputé inférieur, de l’être à un état supérieur. C’est l’événement par lequel “l’homme naturel fait place à l’homme culturel” grâce à l’acquisition certes de nouveaux savoirs, mais surtout de nouveaux droits et devoirs dans la société (à Mlomp, par exemple, on ne peut pas participer à un enterrement dans le cimetière traditionnel si on n’est pas initié, on ne peut pas franchir des étapes rituelles comme le “ hun
gamaj
“si on n’est pas initié, on n’a pas droit au qualificatif de “ An ahaan” si on n’est pas initié, etc.). La cérémonie d’initiation est donc non seulement un processus de socialisation de l’individu mais encore et surtout un exercice de croissance et de maturité qui va culminer dans le sens de la responsabilité, de la notabilité et de la respectabilité. C’est justement à cause de cette complexité de la chose qu’on dit que “l’initiation ne se raconte pas, elle se vit”.

Quant à la question de savoir s’il est obligatoire aujourd’hui de se faire initier, ma réponse est non mais avec une petite nuance! Dans ce contexte de mondialisation et donc de mobilité des individus - (il y aurait même des Joola en Chine maintenant (rire) - les droits et les pouvoirs qu’octroyait autrefois l’initiation n’ont plus un grand sens pratique quand on n’habite pas à Mlomp. De plus, aujourd’hui, toutes les cultures “s’entrepénètrent” et il n’existe donc plus de culture authentique. “L’authenticité Joola” est un leurre quand on sait que même la riziculture ou le “bukut” sont des emprunts culturels historiquement datés.
La culture évolue et les nouvelles générations de Joola qui ne connaissent absolument rien et n’ont aucune expérience du culte des ancêtres ou du “kajandu” , par exemple, ne sont pas moins Joola que les anciens. Ils sont Joola à leur manière et selon leur époque.
Pour conclure, que celui qui souhaite prendre part à une cérémonie d’initiation le fasse, mais en sachant (sauf s’il fait sa vie à Mlomp) qu’il n’en ressortira pas avec plus de pouvoirs symboliques ou de droits par rapport aux autres. Que celui qui décide de ne pas y participer considère aussi (surtout s’il n’habite plus à Mlomp) qu’il ne devient pas pour autant moins Joola que les autres.
Fraternellement,
Patrice Boc


Réaction de Nalik

Félicitation pour ton analyse si pertinente de cet article ahurissant sur la circoncision de l’ abbé Jules Pascal Coly dont je fus l’aîné au grand séminaire de Sébi.  A côté des amalgames que tu soulignes si clairement je déplore la lecture si fondamentaliste qu’il fait des versets de la Sainte Ecriture sur lesquels s’appuie son rejet de la participation des chrétiens à l’initiation.  L’utilisation de la Bible comme un recueil qui fournit réponse aux interrogations des hommes ubi et orbi est découragée par les théologiens.  Dans l’Eglise catholique la Bible est un livre qui donne sens et non des recettes encore moins des réponses à des problèmes étrangers à la culture de Jésus et des écrivains sacrés.

Comme tu le dis si bien, je pense que la décision pour un chrétien de prendre part à l’initiation, repose fondamentalement sur une bonne connaissance de ce qui se fait dans le secret de la forêt.  Seuls des diolas chrétiens initiés, sans parti pris et sans préjugé, peuvent éclairer les non-initiés sur la compatibilité des « apprentissages », des activités en forêt avec la foi chrétienne.  Pour ma part si l’initiation a sens de donner accès au statut d’ « homme accompli », prêt à toutes responsabilités en milieu diola sans comporter l’obligation de poser des actes religieux ou moraux contraires à la foi chrétienne (libation, sacrifice, vol…), rien dans la Bible ne peut justifier que l’on s’y oppose.  Nous devons donc faire montre de prudence et demander conseil au lieu de nous diviser sur une question dont personne ne détient la clé de la solution.

En somme quoi qu’il en soit les chrétiens initiés ne seront pas moins chrétiens que les fondamentalistes tout autant que ceux-ci ne seront pas moins diola que les initiés. 

Nalik ( Henri pour les non-familiers).

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